Name and shame – L’agence dans les médias

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Un de nos métiers consiste à pousser nos clients devant les micros, pendant que nous restons discrètement dans l’ombre. Mais de temps en temps, nous passons devant le micro pour éclairer certains enjeux de communication de crise ou de relations publics.

Le 8 juin, Radio Classique consacrait une partie de sa matinale au sujet de l’inflation dans l’agro-alimentaire. La rédaction a sollicité deux experts pour décrypter l’intention du gouvernement de recourir au « Name and Shame » face aux industriels qui ne se prêteraient pas au jeu de la réouverture des négociations commerciales pour faire baisser les prix. Frank Rosenthal, expert retail a été interrogé, ainsi que Lisa Wyler, fondatrice de l’agence. Le sujet est disponible en replay.

Le Name and shame peut-il fonctionner ?

Voici quelques éléments complémentaires à ce sujet, puisqu’en radio il faut être ultra concis.

D’abord, un point de contexte : 40% des Français ont déjà boycotté une marque (Yougov 2020). Le profil des boycotteurs d’après cette étude était plutôt jeune et CSP+. Ce sont donc des consommateurs qui sont actifs sur les réseaux sociaux et qui savent faire porter leur voix face aux marques.   

Les crises réputationnelles engendrées par ce genre de pratiques, car cela en est une en devenir, peuvent certes avoir un effet sur les ventes. Mais elles peuvent surtout contraindre les marques de communiquer plus rapidement qu’elles ne l’avaient prévu sur les baisses de prix qu’elles mettent en place. Cela peut donc les inciter à aller plus vite, mais surtout à le faire savoir plus rapidement à leurs clients.

A l’inverse, une marque qui refuserait de se plier à cette contrainte prend un risque majeur : l’acceptabilité sociale de cette attitude serait très faible et enverrait un mauvais signal à ses clients, parmi lesquels celui d’un manque de considération et de prise en compte de leurs contraintes financières.

Si l’histoire des crises réputationnelles dans l’agro-alimentaire est plutôt liée à des problématiques sanitaires jusqu’à présent, ou des choix marketing ou publicitaires controversés, il est compliqué d’anticiper à quoi un « name and shame » pourrait ressembler sur les réseaux sociaux. On peut néanmoins imaginer des consommateurs engagés ultra mobilisés, au vu du profil des consommateurs qui ont déjà mené des actions de boycott de marques.

La question que le gouvernement peut se poser est donc : comment frapper fort s’ il recourt au name and shame ? S’il choisit ce que l’on appelle des love brands, les marques que les français adorent, cela peut garantir un impact image fort, mais à condition de cibler des produits peu remplaçables par des marques distributeurs.

Une posture complexe à tenir pour Bercy

Malgré tout, cette menace peut être s’avérer difficile à exécuter pour Bercy face aux exigences qui incombent aux marques de réduire leur impact et leur empreinte carbone. On se retrouve ici encore face à l’équation fin du monde / fin du mois. En effet, si Bercy cible des marques qui sont déjà engagées dans la transition alimentaire, l’entreprise aurait beau jeu de se défendre en expliquant quelles contraintes pèsent sur elle et pourquoi elle fait ce choix. S’engager pour réduire son impact / une juste rétribution des agriculteurs a forcément un coût, qui n’est pas toujours transparent pour le consommateur. Quel message enverrait le gouvernement s’il tape sur une entreprise qui ne baisse pas ses prix assez rapidement mais qui par ailleurs est engagée et responsable ? 


Enfin, L’impact d’un name and shame pourrait être un boycott, qui peut avoir un effet direct sur la pérennité de certains emploi : une marque dont la mise à l’index se traduit par une forte baisse de ses ventes peut considérer que sa présence sur le marché Français n’est plus intéressante au vu du contexte économique et fermer un ou plusieurs sites avec des pertes d’emplois à la clé. Il me semble peu probable que le gouvernement aille aussi loin. Il y a même fort à parier que les interprofessions agissent en coulisse pour éviter ce type de situations extrêmes.

Dans tous les cas, les entreprises qui ont investi dans la transition climatique et fait savoir quelles actions elles mènent dans ce domaine semblent plus protégées que celles qui sont à la traîne en la matière. Ces actions et leur impact, l’image vertueuse qu’elles génèrent peuvent en effet représenter un bouclier d’image face à une menace de mise à l’index.